La photographie à la rescousse de l’archéologie

Félix de Saulcy, membre de l’Académie des Inscriptions et belles lettres depuis 1842, est militaire, numismate, archéologue, épigraphiste, et sera le fondateur de l’archéologie biblique.

Depuis 1701, l’Académie des Inscriptions et belles lettres a pour mission l’avancement et la diffusion des connaissances de l’Antiquité classique, du moyen âge, et de l’ensemble des civilisations de l’Orient proche et lointain. Elle est impliquée dans les campagnes de fouilles archéologiques en Erets Israël et dénie à Jérusalem toute trace juive. Les seuls vestiges en place en terre sainte sont gréco-romains.

En 1850, après le décès de sa femme, Félix de Saulcy entreprend, en compagnie de son fils, un voyage en Grèce, en Turquie, en Syrie et en Terre sainte. Lors de ce voyage d’un an, il parcourt le pays, bible à la main, étudie et observe les vestiges. Il se rend compte alors que tout ce qu’il a appris de ses maîtres à l’Académie des Inscriptions et belles lettres n’est pas fondé. Il découvre qu’il existe des ruines de monuments judaïques à Jérusalem, notamment le mur devant lequel les Juifs viennent prier et qu’il date du Temple de Salomon, les tombeaux de la vallée du Cédron et le tombeau des rois. Il dessine ce qu’il vient de découvrir et publie, en 1853, Le Voyage autour de la Mer Morte et dans les Terres bibliques qui conteste les théories de l’Académie des Inscriptions et belles lettres.

Ses traités topographiques et ses dessins sont considérés par les savants de l’Académie comme de la pure fiction. Personne ne le croit et certains de ses détracteurs l’accuseront de ne jamais avoir effectué le voyage. Il sait que l’Académie se trompe mais comment le lui prouver. Puis la solution va naître : il faut du réel, des clichés. On ne peut pas contester des clichés.

En 1853, Félix de Saulcy propose alors à Auguste Salzmann, peintre de métier qui s’intéresse à l’archéologie et qui est aussi photographe, de l’accompagner dans son voyage en terre sainte. Félix de Saulcy veut lui faire photographier les vestiges d’architecture juive pour rendre un service à la science en rétablissant la vérité, et en éclairant les savants de l’Académie qui à cette époque ne se déplacent pas sur les sites archéologiques. Auguste Salzmann suit la polémique suscitée par Félix de Saulcy sur l’existence de vestiges juifs à Jérusalem. Il prend fait et cause pour de Saulcy. Ils entreprennent leur voyage l’année suivante, en 1854.

Auguste Salzmann va prendre des calotypes et ramener quelques 170 clichés. A Jérusalem, nos deux explorateurs recensent les monuments de l’époque juive, de l’époque grecque, romaine, chrétienne et musulmane, de manière à aider les savants de l’Académie des Inscriptions et belles lettres à y voir plus clair. Après quatre mois de travail incessant, ils rapportent à l’Académie les preuves que les premiers vestiges de Jérusalem sont d’origine juive.